"Miel et charbon" de Thierry FILOU

Ce qui fait la force de notre association, le moteur de nos missions, c’est de venir en aide au plus démunis. Placer l’humain comme point départ. Les rencontres, les souvenirs, parfois joyeux, parfois douloureux… forment le socle de notre engagement et notre source de motivation.

 « Miel et charbon » en est une des plus belles illustrations. Thierry Filou met ses mots au service d’une histoire émouvante, touchante. Commandant de bord chez Air France, mais aussi bénévole chez Aviation Sans Frontières, à la Messagerie Médicale depuis 10 ans, ces deux vies lui ont permis de s’imprégner de situations extraordinaires, de celles qui marquent à jamais. Il s’est notamment engagé après le séisme de 2010 à Haïti et a permis, dans des conditions extrêmement difficiles, d’acheminer 2 tonnes de vivres et de produits de première nécessité. Il raconte également qu’« en tant que commandant de bord, à chaque escale lorsque je demandais aux membres de mon équipage ce qu’ils avaient prévu de faire durant leur temps libre et qu’ils me disaient – je pense faire la sieste – je leur répondais non. Vous venez avec moi reconditionner les colis d’ASF. Tous sans exception s’exécutaient avec beaucoup de générosité et d’engagement ».

Son action humanitaire, les rencontres exceptionnelles faites au fil de ses voyages ont inspiré le pilote, désormais auteur.

« Miel et charbon », son premier roman, est le fruit de 5 ans d’écriture. Entrecoupé de long moments de jachère, il nous livre l’histoire d’Imod, clandestin africain ayant quitté son pays natal pour une autre terre. Celle de l’argent du bonheur ; un père de famille digne, fier, prêt à tout pour sa famille. Persha et leurs filles en seront les bénéficiaires, les victimes aussi. De ce tempérament nait un paradoxe : quitter les siens pour mieux les protéger.  

Destin forcé, responsabilités assumées, la précarité de la vie exige une hauteur nouvelle, révélatrice de la force qu’Imod a en lui.

« Dans cette semi-clarté, Persha se dressait avantageusement au centre de la cuisine. Elle préparait pour ses filles des douceurs dont la recette à base de lait et de sucre lui avait été transmise par sa mère. Subtilement, l’odeur venait se glisser entre chaque brin de paille de la toiture. Les filles étaient assises au sol, assistant au spectacle comme s’il s’agissait de comprendre un tour de magie. Tout était miel jusqu’à ce qu’Imod entre dans la case. Le vent vêtu d’un manteau de sable s’engouffra, et rapidement l’odeur sucrée vint à se transformer. Le labeur faisait son retour, une forte odeur animale, celle que l’on respire lorsque les troupeaux rentrent après la pluie, se répandit dans tout l’habitat. Tout devint charbon. La clarté disparut, les visages se transformaient. Persha reprit un masque de bergère, celui que l’on a envie d’arracher pour voir ses pommettes roses pointer de chaque côté d’un visage souriant. La dureté de la situation transperçait le coeur et l’âme de chacun, les grandes soeurs consolaient les petites. Imod se voulut solennel. La situation était grave, le troupeau atteint de maladie allait périr. Persha s’affairait à nettoyer les gamelles dont le miel qui culottait le fond avait brûlé pour devenir un sucre brun comme du charbon. »

Ainsi commence le périple d’Imod. De son village, il va quitter son continent. Le miel comme espoir et bravoure ; le charbon pour le doute et l’inconnu, son histoire dans un monde nouveau n’est encore qu’une page vierge. Le roman de sa vie s’écrira de lui-même. Et quel roman !

Thierry Filou, avec sa plume subtile et poétique, nous plonge dans une histoire qui lui ressemble. La générosité de ses dix années d’implications avec Aviation Sans Frontières n’a pas de limites : « J’ai trois familles, les miens, unis par des liens de parenté, Air France, mon univers professionnel et ASF. Lorsque j’ai décidé d’écrire, je n’ai jamais envisagé d’autre option, dans l’éventualité où je serais publié, que de le faire au profit de l’association ». C’est ainsi que l’intégralité des droits d'auteur des ventes de son ouvrage seront reversées aux missions d’ASF.

Nous ne pouvons qu’être touchés par ces hommes. Thierry et Imod.

Pour lui, pour eux, pour nous... Merci !