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Jean-Claude GERIN

La réinstallation des réfugiés : comment cela fonctionne ?

28/02/2017

Chaque convoyeur s’est un jour posé la question de savoir comment vont vivre les réfugiés qu’ils accompagnent vers leur nouveau pays d’accueil ? De quelles aides vont-ils bénéficier ? Est-ce que ces programmes de réinstallation fonctionnent ? Pour tenter de répondre à ces questions je suis allé revoir une famille de réfugiés bhoutanais que j’avais accompagnée en mai 2008 depuis Katmandou jusqu’à New York.

 

Dilli et sa famille habitent maintenant dans une confortable maison dans une banlieue de Chicago. Sa femme, après avoir travaillé comme aide-ménagère, élève désormais ses deux enfants aidée de sa belle-mère. Dilli travaille dans un grand hôtel à Chicago. Il supervise une vingtaine de personnes qui s’occupent de l’entretien de l’hôtel dont le propriétaire n’est autre que… le nouveau président des Etats-Unis.

Janvier 2017, je me rends donc à Skokie (Illinois) pour rencontrer cette famille avec laquelle je suis resté épisodiquement en contact grâce à Facebook.

L’accueil est très chaleureux. Les deux femmes ont revêtu à l’occasion de mon arrivée un sari pour me montrer l’importance qu’elles accordent à ma venue. Dilli me présente son fils – qui souhaite devenir un jour ingénieur - et sa fille dont il est très fier car elle est née sur le sol américain et n’aura pas besoin d’être naturalisée.

Je vais avoir l’occasion de déguster un thé en provenance du lointain Népal. On peut habiter à des milliers de kilomètres des vallées de l’Himalaya sans pour autant oublier ses goûts passés.

Dilli me raconte qu’il avait huit ans quand il a dû quitter le Bhoutan avec sa famille, chassée par un tyran qui ne voulait pour son pays qu’une seule ethnie et qu’une seule religion : les siennes. En moins de 24 heures, menacé de mort, tout le monde avait dû fuir pour trouver refuge au Népal. Plusieurs milliers de personnes qui elles aussi avaient tout abandonné s’étaient finalement retrouvées à l’Est du Népal, dans des camps, gérés à la hâte par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés. En quelques jours, plus de cent mille personnes avaient été expulsées et spoliées de tous leurs biens.

Dilli a grandi dans ce camp de Sanischare et après 17 ans de liberté contrainte (il ne pouvait étudier et travailler qu’à l’intérieur du camp) il a pu, avec sa famille, bénéficier du programme de réinstallation aux Etats-Unis.

Partir de zéro et tout recommencer n’est pas facile me confiera-t-il, mais l’aide des associations qui accueillent les réfugiés a été déterminante. Dès son arrivée avec sa femme et sa mère ils ont été logés dans un appartement meublé, bien équipé. Ils ont été financièrement aidés pendant trois mois mais ce délai passé, il leur a fallu trouver un travail pour subvenir à leurs propres besoins et payer le loyer du logement qui leur avait été fourni. Il a fallu apprendre l’anglais, s’habituer à une nouvelle alimentation, prendre de nouvelles habitudes et faire professionnellement ses preuves pour pouvoir évoluer.

Dilli et sa femme ont travaillé dur. "It was very tough" * me dira-t-il. Ils ont économisé dollar après dollar pour acheter à crédit cinq ans plus tard, la maison dans laquelle vit toute la famille.

Avant de quitter Dilli, je lui ai demandé quel était son rêve. "Revoir le Bhoutan avec ma famille mais comme touristes américains." La réinstallation même réussie ne fait pas oublier ses origines et ses racines. Voir d’où l’on vient est peut être aussi une manière de tourner définitivement la page.

 

Jean-Claude GERIN, ancien Président d'Aviation Sans Frontières et Responsable des Accompagnements de Réfugiés

 

 

*C’était très dur.

                                

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