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Accompagments de Réfugiés : Jean-Claude témoigne
22/08/2019
En juin dernier, Jean-Claude Protin, bénévole pour les Accompagnements d’Enfants Malades et les Accompagnements de Réfugiés, a répondu à un appel urgent pour accompagner un jeune réfugié de 16 ans. Ce jeune garçon, autiste, devait impérativement arriver en Suisse avant l’expiration de son visa. Il revient sur cette mission :
« Mercredi 29 mai 23h00, Jean-Claude Gérin (responsable de la mission Accompagnements de Réfugiés, NDLR) envoie un appel à volontaire pour accompagner un jeune autiste de 16 ans entre Addis-Abeba et Zurich le 4 Juin. Son visa expirant le 5 Juin, il doit impérativement arriver en Suisse avant cette date. Emu par cette demande, mais rentrant la veille d’une autre mission, je n’y réponds pas.
Jeudi 30 mai 20h00, c’est Ghislaine Lacaze (membre de l'équipe des Accompagnements de Réfugiés, NDLR), ayant pris le relais, qui envoie un SOS. Il y a urgence à trouver un accompagnateur faute de quoi cet enfant ne pourra pas partir rejoindre sa maman avant peut –être longtemps. Là, bien que n’ayant jamais eu à gérer ce type de handicap, pas d’hésitation, j’appelle pour avoir des précisions.
Ghislaine me fait la lecture du dossier médical. Un peu inquiet malgré tout, je pense avoir la capacité de gérer cette situation. Après avoir regardé l’état des vols nous nous mettons d’accord sur un scénario garantissant une mise en place à Addis-Abeba le 3 juin comme demandé par l’OIM. Ce sera une première tentative de départ par le vol direct CDG/Addis-Abeba du 1er Juin.
Samedi 1er Juin, j’obtiens ma carte d’accès à bord sur le vol Ethiopian sans passer par la case Stand-By, pas besoin d’envisager un plan B ou C … Ouf ! Ca s’annonce bien.
Dimanche 2 Juin, je contacte le bureau OIM d’Addis Abeba pour les avertir de mon arrivée et discuter d’un rendez-vous le lendemain avec Natnael, le jeune garçon que je dois accompagner, dans leur Centre de Transit. OIM me donne le numéro de téléphone des personnes chez qui il est hébergé. Je les appelle. Nous convenons d’une rencontre dans l’après-midi à l’hôtel pour faire connaissance au plus tôt et dans un endroit convivial.
À l’heure dite, je rencontre 3 ados - Natnael et 2 amis, Erythréens comme lui - dont un qui se tient un peu en retrait (je reconnais tout de suite mon futur compagnon de voyage). Natnael ne parle pas un mot d’anglais et les deux autres à peine plus. J’explique à l’aide de petits dessins et fais traduire tant bien que mal les détails de notre voyage vers Zurich, j’essaie de connaître les préférences alimentaires de Natnael, s’il y a des besoins particuliers. Natnael, me regarde, parfois il sourit. Je sens que le courant passe.
Nous nous donnons rendez-vous lendemain à l’aéroport 3h00 avant le départ du vol.
De mon côté j’avais prévu d’y être plus tôt pour les accueillir et éviter le stress lié à la découverte d’un environnement bruyant et mouvementé. À mon arrivée dans le hall, Natnael est déjà là, c’est lui qui me reconnait en premier. Il me fait un signe accompagné d’un sourire. Il se trouve en compagnie d’autres réfugiés, à proximité d’une maman et de ses trois jeunes enfants partant eux aussi pour Zurich.. Notre rencontre de l’après-midi a eu l’effet escompté.
L’enregistrement et les formalités de sécurité/police effectuées sans difficultés, nous nous retrouvons très tôt en salle d’embarquement. Nous partageons un fruit, je lui propose des chewing- gums. Tout va bien, Natnael est calme.
J’en profite pour envoyer un 1er message et photos à sa maman et à l’équipe d’Aviation Sans Frontières de Paris pour rassurer tout le monde.
L’attente se prolonge, je sens qu’il se crispe. Je lui propose d’écouter de la musique sur une radio Suisse à partir de mon smartphone. Ça lui redonne le sourire jusqu’à l’embarquement!
L’installation à bord se passe sans difficultés, nous sommes bien évidemment installés côte à côte. Je lui montre où sont les toilettes, comment ça fonctionne, pareil pour le siège, la ceinture de sécurité et le système de divertissement à bord.
Le vol se déroule normalement, Natnael réagit comme tout gamin de son âge ; il zappe entre films, musique. Je lui montre au travers du hublot les éclairs d’un orage électrique au loin. Je sens qu’il n’aime pas, je baisse le rideau. Le menu du dîner lui plait. Il dévore tout. Malgré mon incitation, il refuse d’aller aux toilettes (le confinement de cet espace ne lui a sans doute pas plu) et s’endort pour quelques heures avant notre arrivée à Doha.
Après les formalités, nous passons 1h dans une salle de repos de la zone de transit avant de repartir sur le 2e vol vers Zurich.
À bord, plus besoin d’expliquer, je le sens à l’aise (sauf pour les toilettes qu’il refuse toujours d’aller visiter…). Le vol se passe sans encombre. Le menu du petit déjeuner lui plait aussi. Il reprend sa séance de zapping. À mi-parcours, je profite de la connexion wifi à bord pour envoyer un nouveau message à tout le monde qui suit notre voyage. Il se met à tester tous les jeux qu’il ne parvient pas à maîtriser. Ca l’énerve ! Je lui montre comment jouer à « Angry Birds ». Il adore mais me fait comprendre qu’il veut que je joue avec lui. Nous y passerons des heures avec à chaque niveau de difficulté franchi un large sourire de satisfaction. Il est heureux et moi, encore plus !
Arrivée à Zurich à l’heure, formalités d’immigration, récupération des bagages en un temps record.
Nous sortons, sa maman est là dans Hall d’arrivée, un bouquet de fleurs à la main, ils se jettent dans les bras l’un de l’autre. Je me tiens à distance pour ne pas perturber ces retrouvailles et ce grand moment d’émotion pour eux comme pour moi.
Après quelques photos, vient le moment de nous quitter. D’abord poignée de mains à la maman. Je tends ensuite ma main à Natnael qui en retour me prend dans ses bras ! Quelle émotion ! »